Problèmes d’approvisionnement en uranium
Le Maroc est en train de se préparer activement à développer l’énergie nucléaire sur son territoire. Les différentes administrations marocaines travaillent depuis plusieurs années sur les lois et le cadre légal nécessaires à la mise en place de cette filière. De plus, des organismes publics, tels que l’Agence marocaine de sûreté nucléaire, ont été créés dans le but de superviser cette nouvelle filière.
Mais pourquoi le Maroc a-t-il décidé de se lancer dans le nucléaire ?
Quels sont les objectifs derrière cette décision ?
Les principaux pays producteurs d’uranium
Il est important de connaître les principaux pays producteurs de cette ressource. Les quatre plus grands producteurs d’uranium dans le monde sont l’Australie, la Namibie, le Canada et le Kazakhstan. Ce dernier pays est d’ailleurs en tête en termes de production.
Cependant, la production d’uranium ne reflète pas nécessairement les réserves disponibles. En examinant les réserves connues, nous constatons que le Maroc possède les plus grandes réserves d’uranium au monde, estimées à plus de 6,9 millions de tonnes. Cette information, provenant de l’Agence internationale de l’énergie atomique, peut surprendre, car le Maroc n’exploite pas encore ces réserves.
Les défis de l’exploitation de l’uranium au Maroc
La raison pour laquelle le Maroc n’a pas encore exploité ses réserves d’uranium réside dans les défis économiques liés à la production. L’uranium au Maroc se trouve dans des dépôts de phosphorites marins, qui sont des roches contenant également du phosphate. La concentration d’uranium dans ces dépôts est plus faible que celle que l’on trouve dans les dépôts de phosphorites organiques, comme ceux du Kazakhstan.
Pour obtenir 1 kg d’uranium pur au Maroc, il faut traiter environ 10 tonnes de roche, alors qu’au Kazakhstan, seulement 2 tonnes de roche suffisent pour extraire 1 kg d’uranium. De plus, les procédés d’extraction chimique sont différents pour ces deux types de gisements. Tout cela rend l’uranium du Maroc plus cher à extraire que celui du Kazakhstan.
Ces facteurs économiques ont rendu l’exploitation de l’uranium marocain non rentable jusqu’à récemment. En fait, de nombreuses estimations mondiales des réserves d’uranium n’incluent pas les dépôts de phosphorites marins, car ils sont considérés comme économiquement non rentables.
Évolution des prix de l’uranium et opportunités pour le Maroc
Au cours des dernières années, le prix de l’uranium a considérablement augmenté. Alors qu’il se vendait entre 40 et 80 dollars le kilo de 2014 à 2021, il a récemment dépassé les 235 dollars le kilo. Cette hausse des prix s’explique par la volonté de nombreux pays de développer l’énergie nucléaire et de sécuriser leur approvisionnement en uranium.
Face à cette augmentation des prix, les réserves d’uranium du Maroc deviennent de plus en plus attrayantes. Bien que le seuil de rentabilité de l’exploitation de l’uranium marocain ne soit pas clairement défini, il est probable que le Maroc entame l’exploitation de ses réserves au cours des prochaines années.
Ce développement de l’énergie nucléaire permettrait au Maroc de devenir totalement indépendant sur le plan énergétique, ce qui est essentiel tant d’un point de vue économique que géostratégique.
Coopération entre le Maroc et la Russie
Historiquement, le Maroc a toujours entretenu de bonnes relations avec les pays occidentaux, notamment les États-Unis et la France. Ces pays sont également experts dans les technologies nucléaires. On aurait donc pu penser que le Maroc aurait choisi de coopérer avec eux. Cependant, dans les relations internationales, les choix sont souvent motivés par les intérêts des pays.
C’est pourquoi le Maroc a choisi de coopérer avec la Russie. En effet, la Russie, notamment à travers sa société Rosatom, est un leader mondial dans le domaine du nucléaire. Rosatom est spécialisé dans l’enrichissement de l’uranium et fournit plus d’uranium enrichi aux centrales nucléaires du monde entier que toute autre société. Même les sanctions internationales imposées à la Russie n’ont pas affecté Rosatom en raison de son importance pour le fonctionnement de certaines centrales nucléaires américaines.
De plus, Rosatom est en avance dans le développement des réacteurs nucléaires de petite taille appelés “SMR” (small modular reactors). Il s’agit de réacteurs plus petits que les réacteurs conventionnels et leur fabrication en usine permet de réduire les coûts et de faciliter la gestion de la sûreté. Le Maroc est intéressé par cette technologie des SMR, car elle offre une solution plus rapide, plus sûre et moins coûteuse pour développer l’énergie nucléaire sur son territoire.
Alors que d’autres pays, tels que les États-Unis et la France, tentent de rattraper leur retard dans le domaine des SMR, Rosatom a déjà construit et mis en service des réacteurs de ce type depuis 2019. Cette avance technologique explique pourquoi le Maroc a choisi de coopérer spécifiquement avec la Russie.
Conclusion
En conclusion, le Maroc se prépare activement à développer l’énergie nucléaire sur son territoire. Malgré les défis liés à l’approvisionnement en uranium, les immenses réserves du Maroc deviennent de plus en plus attrayantes en raison de l’augmentation des prix de cette ressource. De plus, la coopération avec la Russie, notamment à travers Rosatom, offre au Maroc une opportunité de développer l’énergie nucléaire en utilisant la technologie des SMR.